La suspension naturelle du souffle
Plusieurs fois il a été conseillé d'attendre que le besoin d'air déclenche l'inspiration. Certains ont pu croire qu'il s'agissait là d'un moyen technique ayant pour but de favoriser la respiration. En réalité, ce n'est pas un artifice adroit, mais le respect d'une phase que chacun de nous peut observer sur lui-même.
Étant assis ou étendu pour faciliter un calme propice à cet examen intérieur, on constate, après avoir laisser sortir l'air des poumons, l'existence d'une période de pause plus ou moins longue.
Cette pause n'est pas une rétention et ne doit pas le devenir, elle souligne le passage naturel de la détente expiratoire à la tension inspiratoire.
Parfois c'est une véritable découverte intime que cette libre suspension de souffle pendant laquelle on n'a plus envie d'expirer davantage et pas encore besoin d’inspirer déjà . Pour la première fois on perçoit que la tension juste s'élabore au cours d'un lâcher-prise confiant.
Laissons-nous aller au creux de cette vague respiratoire, elle risque de nous emporter vers des horizons insoupçonnés. L'écho de cette onde de silence apaisant se propage sur trois plans: corporel, mental et supramental, modifiant peu à peu notre comportement.
Encore faudra t-il à l'avenir ne plus négliger ce moment de détente dynamisante en revenant aussitôt à une respiration à deux temps figurée par des zigzags irréguliers, d'une inspiration courte ou longue suivie d'une expiration insuffisante.
Cette manière commune de respirer localise le souffle dans la zone de tension thoracique relayant le jeu superficiel ou nul d'un diaphragme inerte ou tendu.
Bien qu'au début du moins, il s'avère utile parfois, pour des personnes très nerveuses de ponctuer cette courte suspension en l'accentuant volontairement. Il ne convient pas de "retenir" le souffle mais de le laisser aller au plus bas de sa course pour faire place à l'inspiration suivante.
Après avoir ressenti l'allègement que nous procure cette suspension naturelle du souffle, nous ne pouvons plus ne pas y recourir.
Mais plus encore qu'un bien-être, cette césure conforme à la nature où règne la ligne courbe, rétablit l'ondulation fluctuante: "expiration, pause, inspiration" témoignant de l'accord "tension-détente".
Au contraire, les dents de scie de la respiration à deux temps, génératrice des soupirs, de bâillements sporadiques, manifestent sur le plan physique nos blocages et contraintes des plans psychique et affectif qui se répercutent en tensions discontinues dans l'organisme. Le courant vital qui, normalement, est porté par l'onde respiratoire, s'en trouve alors interrompu, haché, dispersé.
Contrairement à ce que préconisent presque tous les ouvrages sur les pratiques yoguiques, y compris mon "A B C du yoga", la valeur de chaque période ne sera plus chiffrée systématiquement, mais occasionnellement.
Ainsi au début on contrôlera le temps écoulé en comptant la durée de l'inspiration et de l'expiration, afin de vérifier et de rectifier les rapports des deux phases. Dès que la proportion souhaitée est obtenue, laissez faire le souffle.
On se rappelle que l'expiration se prolonge deux fois plus longtemps que l'inspiration. Cette dernière, comme la pause intermédiaire, pouvant s’étendre sur une ou plusieurs secondes selon l'activité, le repos ou l'amplitude respiratoire.
Cette façon de procéder supprime toute tendance à la compétition. La tentation de "faire mieux la prochaine fois" n'ayant pas sa raison d'être, ici la plus ou moins grande capacité thoracique n'entre plus en ligne de compte, pas plus que l'état de santé ou l'âge.
Cette respiration incline à la continuité du travail sur nous-même que suggère cette manière de considérer le yoga.
Extrait de "Le yoga sans postures" de Philippe De Méric p 170 (livre écrit en 1967)
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Apprenons à bien respirer pour acquérir une bonne santé. Souvenons-nous que nous ne pouvons vivre sans respirer et qu'en respirant à moitié... nous ne vivons qu’à moitié. Et dans les textes anciens (Hatha-Yoga-Pradîpikâ), il est précisé : La vie est la période de temps entre une respiration et la suivante, une personne qui respire à moitié vit à moitié. Celui qui respire correctement acquiert la maîtrise de son être.
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